Les mines déconfites du groupement face à la situation.

Guinée Conakry - Notre société est friande de «success stories». Assumer les échecs et en tirer les leçons est crucial pour rebondir.

L’unité d’extraction d’huile dans le village de Songoronya avait démarré sur les chapeaux de roues. Les équipements, et en particulier la presse à huile de palmiste, tournaient à plein régime. Notre équipe de coordination avait même assisté lors d’une visite improvisée au chargement d’un camion complet d’huile. En quelques mois, l’unité était devenue une référence qui pulvérisait un record après l’autre.

Le choc

Les membres du groupement local avaient pu atteindre ces résultats hors normes uniquement en raison de la mécanisation du processus de transformation. Au fur et à mesure qu’ils utilisaient leurs équipements de manière intensive, les pannes ont commencé à s’accumuler et les dépenses pour y remédier aussi. La production devenait aléatoire et certains clients dubitatifs. Le succès initial nous avait aveuglés. L’unité était en train d’agoniser lentement. Les réunions avec le groupement étaient d’ailleurs de plus en plus tendues jusqu’au jour où celuici a annoncé à l’équipe que les caisses étaient vides et que la décortiqueuse et la presse à huile de palmiste étaient en panne.

Auto-critique

Il serait facile de blâmer le groupement. Les membres ont certes commis des erreurs, mais la réussite a sans doute été trop rapide. Une auto-critique est nécessaire.

Le passage d’une transformation manuelle pratiquée sous des palmiers à une transformation mécanisée est un saut important pour un tel groupement. Nous ne l’avions pas perçu suffisamment tôt. Nous avons transmis les outils et effectué notre accompagnement d’une manière défaillante. N’oublions jamais que le développement ne se décrète pas, il accompagne. Cette position d’humilité est nécessaire. Cette situation nous a menés à revoir nos processus d’accompagnement des groupements dans le domaine des activités génératrices de revenus.

Se relever

Cet échec a eu des répercussions psychologiques sur le groupement. L’espoir a été remplacé par la désillusion. Plusieurs membres se sont mis à se dénigrer ouvertement. Dans un premier temps, il a fallu s’improviser psychologue pour libérer la parole des membres et leur permettre d’exprimer leur ressenti. Puis il a fallu envisager des scénarios de sortie de crise. Ce processus prend du temps. Il est toujours en cours. Il est crucial de s’adapter au rythme des bénéficiaires. L’option actuelle la plus probable vise à octroyer un crédit au groupement pour remettre les équipements en état de marche et en parallèle de l’accompagner durant les deux prochaines années.

Nous avions crié victoire trop vite. La fin de l’histoire est loin d’être écrite. L’avantage est qu’on apprend mieux de ses erreurs. Les membres du groupement et nous-mêmes sommes confiants pour l’avenir.

Xavier Mühlethaler